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faire ouvertement la guerre que de décorer du nom de justice et d’amitié le sommeil et l’inactivité momentanée de leur injustice. C’est ce que prouva Pyrrhus. Pour se jeter au-devant de Démétrius, qui aurait pu encore se relever, et pour empêcher qu’il ne recouvrât ses forces comme après une grande maladie, il alla secourir contre lui les Grecs, et entra dans Athènes. Là, il monta dans l’Acropole, y offrit un sacrifice à la déesse, et, en étant descendu le même jour, il dit qu’il était enchanté des bons sentiments et de la confiance que le peuple venait de lui témoigner ; mais que, s’ils étaient sages, ils ne laisseraient jamais entrer aucun roi dans leur ville, et qu’ils n’en ouvriraient jamais les portes[1]. Après cela, il fit la paix avec Démétrius ; et, quelque temps après, celui-ci s’en étant allé guerroyer en Asie, Pyrrhus, à la sollicitation de Lysimachus, fit soulever la Thessalie et attaqua les garnisons grecques qui s’y trouvaient ; car il était plus maître des Macédoniens en les occupant à la guerre qu’en les laissant en repos ; et lui-même d’ailleurs n’était pas né pour l’inaction.

Cependant Lysimachus, après avoir vaincu Démétrius en Syrie et l’avoir mis hors d’état de continuer la guerre, tranquille de ce côté et n’ayant plus d’autres affaires sur les bras, marcha sur-le-champ contre Pyrrhus, qui s’était alors établi dans les environs d’Édesse. Il attaqua un convoi de vivres qu’on lui amenait, l’enleva, et réduisit tout d’abord Pyrrhus à une grande disette ; ensuite, par lettres et par discours, il gagna les premiers des Macédoniens, en leur faisant honte d’avoir préféré pour maître un étranger dont les ancêtres avaient toujours été les esclaves des Macédoniens, et d’avoir repoussé les amis et les fidèles compagnons d’Alexandre. Beaucoup

  1. Ils profitèrent de cet avis, et chassèrent la garnison de Démétrius.