environ douze cents, victimes du sort dignes en tout temps de pitié, mais bien plus à plaindre, comme on peut penser, dans une circonstance où ils se trouvaient au milieu de leurs fils, de leurs frères et de leurs amis : esclaves, ils les voyaient libres ; prisonniers, ils les voyaient victorieux. Titus, si vivement touché qu’il fût de leur infortune, ne voulut pas les enlèvera leurs maîtres ; mais les Achéens payèrent leur rançon à cinq mines par tête[1], et, les ayant tous réunis en une seule troupe, ils les livrèrent à Titus au moment où il allait s’embarquer. Il mit à la voile, joyeux d’emporter, en retour d’actions si nobles, une noble récompense et digne d’un grand homme, et d’un homme dévoué à ses concitoyens. Ces Romains firent, je n’en doute pas, le plus bel ornement de son triomphe ; ils s’étaient tous rasé la tête, et se l’étaient couverte de bonnets, comme c’est la coutume des esclaves qu’on affranchit : ils suivirent en cet état le char triomphal de Titus. Les dépouilles qui furent portées en pompe à ce triomphe frappaient les spectateurs par leur beauté : c’étaient des casques grecs, des boucliers macédoniens, et des sarisses[2]. On y voyait aussi une grande quantité d’or et d’argent ; car Itanus[3] assure qu’on porta, dans le triomphe, trois mille sept cent treize livres d’or en lingots, quarante-trois mille deux cent soixante-dix livres d’argent et quatorze mille cinq cent quatorze philippes d’or, sans compter les mille talents que Philippe devait payer. Mais, dans la suite, les Romains, à la sollicitation de Titus, firent remise à Philippe de cette dette : ils le déclarèrent leur allié, et lui rendirent son fils, qu’ils avaient en otage.
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