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leurs institutions politiques une vengeance aussi injuste que cruelle.

Il détruisit et abolit la discipline de Lycurgue, en forçant les enfants et les jeunes gens à recevoir, au lieu de l’éducation nationale, celle de l’Achaïe, convaincu que, tant qu’ils observeraient les lois de Lycurgue, jamais ils n’auraient que de nobles sentiments. Ils permirent alors à Philopœmen de couper les nerfs de leur république, apprivoisés qu’ils étaient et humiliés sous le poids de leurs malheurs. Dans la suite ils adressèrent des réclamations aux Romains, et obtinrent de se soustraire aux institutions achéennes ; et ils rétablirent, autant que cela était possible, après tant de maux et une corruption aussi longue, les lois de leurs pères.

Lorsque la guerre de Rome contre Antiochus commença dans la Grèce, Philopœmen n’était que simple particulier. Antiochus restait à Chalcis, perdant son temps à des amours de jeunes filles qui n’allaient plus à son âge, et célébrant ses noces, tandis que les Syriens, dans un grand désordre et sans chef, erraient se gorgeant de délices par les villes. Philopœmen, qui voyait cela, regrettait de n’être point à la tête de l’armée des Achéens, et il disait qu’il enviait aux Romains la facilité de la victoire. « Si j’étais général, disait-il, j’aurais bientôt taillé tous les ennemis en pièces dans leurs tavernes. »

Une fois Antiochus vaincu, les Romains donnèrent aux affaires de la Grèce une attention plus suivie. Leur armée enveloppait de tous côtés les Achéens, et les démagogues achéens inclinaient intérieurement pour eux. La puissance romaine marchait à la conquête du monde ; grande par elle-même et secondée par la faveur de la divinité, le but était proche, vers lequel l’emportait la fortune, et où elle devait nécessairement arriver. Pour lui, comme un bon pilote qui lutte contre les flots, force lui était bien de se laisser aller, de céder souvent aux circon-