Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/292

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mis, elle ne s’attendait plus à combattre, mais croyait l’action finie et la victoire assurée sur tous les points. Après avoir mis cette infanterie en déroute et en avoir fait un grand carnage, car on dit qu’il périt dans l’action plus de quatre mille hommes, il se tourna contre Machanidas, qui revenait de la poursuite avec ses mercenaires.

Séparés par un fossé large et profond, ils se mirent à chevaucher vis-à-vis l’un de l’autre, chacun sur un bord du fossé, cherchant l’un à le passer pour s’enfuir, l’autre à l’en empêcher. On eût dit non pas deux généraux qui se combattent, mais une bête fauve réduite à la nécessité de se défendre, et un chasseur intrépide qui l’attend au choc : le chasseur, c’était Philopœmen. Cependant, le cheval du tyran, qui était vigoureux et plein d’ardeur, excité d’ailleurs par les éperons qui lui déchiraient et ensanglantaient les flancs, se hasarda à franchir le fossé, et se dressa sur les pieds de derrière, pour lancer d’un bond, sur l’autre bord, ses pieds de devant. Dans ce moment Simnias et Polyénus qui, dans les batailles, se tenaient toujours à côté de Philopœmen et joignaient avec lui leurs boucliers, accoururent ensemble la lance baissée contre l’ennemi. Philopœmen les prévint, en se jetant au-devant de Machanidas ; et, le voyant tout à fait couvert par la tête de son cheval qui se dressait, il jeta le sien un peu de côté, et, prenant son javelot de l’autre main, il le lança de toute sa force, et renversa l’homme dans le fossé. On le voit représenté dans cette attitude au temple de Delphes : c’est un monument que lui dressèrent les Achéens, en l’honneur de cet exploit et de sa belle conduite comme général dans cette journée.

On raconte que la célébration des jeux néméens concourut à peu près avec cet événement. Philopœmen avait été élu général pour la deuxième fois ; sa victoire de