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et fond avec elle sur l’ennemi. Les voltigeurs sont d’abord troublés, puis mis en fuite avec un grand carnage. Pour encourager encore les gens du roi et les engager à profiter du trouble de l’ennemi en se jetant sur lui avec rapidité, Philopœmen met pied à terre et laisse son cheval. Il marchait sur un terrain inégal et coupé de ruisseaux et de ravins, à pied, avec sa cuirasse de cavalier, chargé d’une armure pesante, combattant avec beaucoup de difficulté et de fatigue.

Dans ce moment il fut atteint d’un javelot qui lui perça en même temps les deux cuisses. La blessure n’était pas mortelle ; mais le coup fut si fort que le fer traversa l’une et l’autre cuisse. Il fut d’abord arrêté comme s’il eût eu les jambes liées, sans pouvoir faire un mouvement ; il était fort difficile, à cause de la courroie du javelot, de le retirer en le faisant repasser par les deux blessures. Ceux qui se trouvaient là n’osaient y toucher ; le combat était fort animé : aussi trépignait-il de colère et d’impatience d’agir. À force de remuer les jambes et de les secouer, il brisa le trait par le milieu et en fit retirer de la plaie séparément les deux tronçons. Débarrassé ainsi, il mit l’épée à la main, et, traversant les premiers rangs, il marcha à l’ennemi et inspira aux combattants la plus grand ardeur et l’émulation la plus vive.

Antigonus, après la victoire, voulut mettre à l’épreuve les Macédoniens : il leur demanda pourquoi l’on avait, sans son ordre, mis en mouvement la cavalerie ; et, comme ils s’excusaient en disant qu’ils s’étaient trouvés aux prises avec l’ennemi malgré eux, et forcés par un jeune Mégalopolitain qui avait chargé avant le signal : « Hé bien, ce jeune homme, reprit Antigonus en riant, a fait acte de grand capitaine. »

Depuis ce temps, Philopœmen fut et dut être en grand renom. Antigonus voulut se l’attacher, et lui fit des instances pour le décider, lui offrant un commandement