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nymphes Sphragitides ; s’ils sacrifiaient aux héros Androcratès, Leucon, Pisandre, Damocratès, Hypsion, Actéon et Polydius, et qu’ils ne risquassent de bataille que dans leur propre pays, sur le champ de Cérès Éleusienne et de Proserpine. Cet oracle jeta Aristide dans une grande perplexité : les héros que le dieu ordonnait d’honorer par des sacrifices étaient, il est vrai, les ancêtres des Platéens, et l’antre des nymphes Sphragitides était sur une des croupes du mont Cithéron, tourné vers le couchant d’été. Il y avait, dit-on, autrefois un oracle dans cet antre, et la plupart des habitants du pays étaient possédés de l’esprit prophétique : ces inspirés se nommaient Nympholeptes[1]. Mais ne promettre la victoire aux Athéniens qu’autant qu’ils combattraient dans le champ de Cérès Éleusienne et sur leur propre territoire, c’était rappeler et transporter de nouveau la guerre dans l’Attique.

Cependant le général des Platéens, Arimnestus, crut voir en songe Jupiter Sauveur : « Qu’ont résolu les Grecs, demanda le dieu ? — Seigneur, répondit Arimnestus, nous emmènerons demain l’armée à Éleusis ; et c’est là que nous combattrons les Barbares, comme le veut l’oracle d’Apollon. — Les Grecs se trompent du tout, répliqua Jupiter ; le lieu désigné par l’oracle est ici même, aux environs de Platée ; qu’ils cherchent bien, ils le trouveront. » Cette vision ne laissa aucun doute dans l’esprit d’Arimnestus : à peine éveillé, il fait appeler les plus vieux et les plus instruits de ses concitoyens, il confère avec eux, et, après une recherche attentive, on trouve qu’il y a près d’Hysies, au pied du Cithéron, un vieux temple dédié à Cérès Éleusienne et à Proserpine. Aussitôt il va prendre Aristide, et le mène sur les lieux : c’était un emplacement très-commode pour y

  1. Littéralement possédés des nymphes.