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Certain que la commodité du lieu ne manquerait pas d’attirer les Romains, il remplit le bois et les ravins de gens de traits et de piquiers. Son espoir ne fut pas trompé. Tout d’abord il n’y eut qu’un bruit dans le camp romain, c’est qu’on devait occuper cette position ; tous tranchaient du général d’armée : « Quel avantage sur l’ennemi, si l’on campait là, ou si du moins on élevait un fort sur la colline ! » Marcellus crut de son devoir d’aller lui-même à cheval avec un petit nombre de cavaliers reconnaître la position. Il manda le devin, et offrit un sacrifice. Lorsque la première victime tomba, le devin lui montra le foie sans tête. Une deuxième fut immolée, le foie avait une tête d’une grosseur énorme, et tous les autres signes étaient extrêmement favorables : ce qui parut effacer ce qu’il y avait de funeste dans les premiers présages. Les devins pourtant soutenaient qu’il y avait en cela sujet de craindre encore plus, et de se troubler ; parce que l’apparition de signes aussi favorables après d’autres si tristes et si effrayants, était un changement trop extraordinaire pour qu’on ne dût pas s’en défier. Mais, comme le dit Pindare,

Ni le feu, ni un mur d’airain n’arrêteraient la destinée.


Il sortit donc, avec Crispinus son collègue, son fils, qui était tribun de légion, et en tout deux cent vingt cavaliers, dont pas un Romain : ils étaient tous Étrusques, quarante Frégellans seuls exceptés, lesquels avaient toujours donné à Marcellus des preuves de leur bravoure et de leur fidélité.

La colline était boisée et fort couverte : au sommet un homme était en sentinelle : invisible aux ennemis, il découvrait au-dessous de lui le camp des Romains. Cet homme avertit de ce qui se passait les soldats placés en embuscade. Ceux-ci laissent avancer Marcellus, et,