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teindre leurs ennemis : ils arrivent, ils fondent sur eux : tout y était en désarroi ; au premier choc, ils eurent pris la fuite. Aussi n’y en eut-il guère plus de trois cents qui furent tués ; on fit le double de prisonniers, et on s’empara du camp.

Les Adranites ouvrirent leurs portes à Timoléon et se livrèrent à lui, racontant avec un étonnement mêlé d’horreur qu’au commencement du combat le vestibule sacré de leur temple s’était ouvert de lui-même ; qu’on avait vu le dieu agiter le fer de sa pique, et son visage inondé de sueur : prodiges, ce semble, qui ne présageaient pas seulement cette première victoire, mais les exploits qui la suivirent, et dont ce combat fut l’heureux début. En effet, plusieurs villes envoyèrent aussitôt des députés à Timoléon, et firent leur soumission. Mamercus, tyran de Catane, homme guerrier, et puissant par ses richesses, fit alliance avec lui ; et, ce qui était bien plus important, Denys lui-même, désespérant de sa cause, et se voyant à la veille d’être forcé dans la citadelle, prit en profond dédain Icétas qui venait d’être honteusement vaincu ; et, pénétré d’admiration pour Timoléon, il députa vers lui pour se remettre, lui et la citadelle, au pouvoir des Corinthiens.

Timoléon saisit à point ce bonheur inespéré, et charge deux Corinthiens, Euclide et Télémachus, de faire entrer quatre cents soldats dans la citadelle, non pas tous ensemble ni pendant le jour, ce qui eût été impossible, car les ennemis étaient maîtres du port, mais secrètement, et par petites troupes. Ces soldats prennent possession de la citadelle et des palais du tyran, ainsi que de ses meubles et de toutes ses provisions de guerre. C’étaient des chevaux en grand nombre, toutes sortes de machines, et une grande quantité de traits. Il s’y trouva des armes pour soixante-dix mille hommes, qu’on y avait amassées depuis longtemps. Denys avait aussi deux mille