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de cavaliers qui combattaient tout à la fois une cavalerie et une infanterie ; et ils remportèrent une victoire unique dans son genre, extraordinaire, incroyable : on n’a jamais écrit qu’une cavalerie si faible par le nombre ait vaincu à la fois tant de cavaliers et de fantassins réunis, soit avant cette journée, soit depuis. Marcellus fit un grand massacre des ennemis ; et, après s’être emparé de leurs armes et des richesses de leur camp, il alla rejoindre son collègue. Celui-ci soutenait péniblement la guerre contre les Celtes, sous les murs d’une fort grande et très-populeuse ville de la Gaule, nommée Milan ; les Celtes du pays la regardent comme leur métropole : aussi déployaient-ils l’ardeur la plus vive à la défendre. Cornélius assiégeait la ville, eux assiégeaient Cornélius. Lorsque Marcellus fut arrivé, les Gessates, ayant appris la défaite et la mort de leur roi, se retirèrent ; Milan fut prise, les Celtes livrèrent leurs autres villes, et se remirent, eux et leurs biens, à la discrétion des Romains. On leur accorda alors la paix à des conditions modérées.

Le Sénat décerna le triomphe à Marcellus seul. L’éclat de cette pompe, la richesse des dépouilles, et la taille extraordinaire des prisonniers firent de ce triomphe un des plus admirables que l’on eût jamais vus. Mais le spectacle le plus agréable pour les Romains, et le plus nouveau, c’était Marcellus lui-même portant au dieu l’armure complète du Barbare. Il avait fait couper un grand et beau chêne de montagne ; et, après l’avoir fait polir et arranger en forme de trophée, il y avait attaché et suspendu toutes les pièces de l’armure disposées en ordre et adaptées les unes aux autres. Quand la pompe se mit en marche, il monta sur le quadrige, et traversa triomphalement la ville, tenant dans ses mains, dressée en pied, cette statue-trophée, le plus remarquable et le plus bel ornement de son triomphe. L’armée suivait, revêtue d’armes superbes, et chantant des hymnes de