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devant Acerres, avec toute l’infanterie pesamment armée et un tiers de la cavalerie ; et, prenant avec lui le reste de la cavalerie et les fantassins les plus agiles, au nombre d’environ six cents, il partit, et marcha jour et nuit sans s’arrêter ; enfin il tomba sur les dix mille Gessates près de Clastidium[1], bourgade de la Gaule nouvellement soumise aux Romains.

Mais il n’eut pas le temps de se reconnaître et de faire reposer sa troupe ; car à peine arrivait-il que les Barbares s’en aperçurent. Ils ne virent qu’avec dédain le petit nombre de ses fantassins ; quant à sa cavalerie, les Celtes n’en pouvaient faire aucun compte, étant particulièrement redoutables dans les combats de cavalerie, et passant pour y exceller ; d’ailleurs, dans cette circonstance ils avaient encore sur Marcellus, et de beaucoup, la supériorité du nombre. Incontinent ils se portèrent sur lui, pensant l’enlever d’emblée ; ils chargeaient avec beaucoup de vigueur, proférant des menaces terribles, et ayant le roi à leur tête. Marcellus, pour les empêcher de se répandre autour de lui et de l’envelopper, ce qui leur était facile vu le petit nombre de ses gens, déploya ses escadrons sur une ligne fort étendue, en amincissant toujours son aile pour l’allonger, jusqu’à ce qu’il fût près de l’ennemi. Il se disposait à marcher en avant, quand son cheval, effrayé des cris sauvages que poussaient les Barbares, fit un demi-tour, et l’emporta en arrière malgré lui. Marcellus eut peur que cet accident ne causât parmi les Romains quelque trouble, suite d’une crainte religieuse ; il lui serra promptement la bride à gauche, lui fit achever le tour, et, le remettant en face de l’ennemi, il s’inclina devant le soleil et l’adora. Il parut ainsi avoir fait cette évolution non point sans le vouloir, mais précisément dans ce but ; car c’est la coutume

  1. Entre Milan et Plaisance.