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Un jour qu’il assistait à la représentation des Troyennes d’Euripide, il sortit et s’éloigna du théâtre ; mais il envoya dire à l’acteur de ne pas s’en effrayer et de ne pas jouer moins bien, parce que, s’il s’en était allé, ce n’était point qu’il fût mécontent de son jeu, mais qu’il rougirait, si, lui qui n’avait jamais eu de pitié pour aucun de ceux qu’il avait fait tuer, on le voyait pleurer, en présence de ses sujets, sur les malheurs d’Hécube et d’Andromaque. Et cependant cet homme, effrayé de la gloire et du grand nom d’Épaminondas, et de la manière dont il dirigeait la guerre,

Frémit, comme un coq baissant son aile captive[1],


et lui envoya promptement des députés pour se justifier. Épaminondas ne pouvait se décider à conclure un traité de paix et d’amitié entre un tel homme et les Thébains ; il convint seulement d’une trêve de trente jours, et il ramena son armée après s’être fait remettre Pélopidas et Isménias.

Pendant ce temps, les Athéniens et les Lacédémoniens avaient envoyé des ambassadeurs au grand roi, pour faire avec lui un traité d’alliance ; les Thébains en ayant été informés lui envoyèrent, de leur côté, Pélopidas : c’était, vu sa réputation, le meilleur choix qu’ils eussent pu faire. En effet, son nom était fort répandu et fort célèbre dans les provinces du roi qu’il eut à traverser. Ce n’était point lentement, et peu à peu, que s’était avancé dans l’Asie le bruit de ses combats contre les Lacédémoniens ; mais, depuis qu’on y avait appris la nouvelle de la victoire de Leuctres, il n’avait point cessé d’ajouter à ses succès, et sa renommée, grossissant tou-

  1. On a déjà vu cette citation dans la Vie d’Alcibiade.