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Philippe, alors polémarques. Depuis longtemps Épaminondas, de son côté, avait rempli les jeunes gens d’une noble confiance : dans les gymnases, il les engageait toujours à s’attaquer, pour la lutte, à des Lacédémoniens ; puis, quand il les voyait tout fiers de leur supériorité et de leur victoire, il venait leur faire sentir vivement combien ils devaient en être plus honteux de se voir par leur lâcheté les esclaves de ceux qui leur étaient si inférieurs en vigueur et en force.

On fixa le jour de l’exécution ; et les exilés décidèrent que tous s’en iraient sous la conduite de Phérénicus, et qu’ils s’arrêteraient à Thriasie[1], tandis que quelques-uns des plus jeunes iraient se jeter au milieu du péril et entreraient dans la ville ; mais il fut convenu que, s’il leur arrivait mal, tous les autres ensemble auraient soin de fournir à leurs enfants et à leurs parents toutes les choses nécessaires à la vie. Pélopidas se présenta le premier pour faire partie de ce détachement ; après lui venaient Mélon, Damoclidès et Théopompe, tous hommes des premières familles, tous pleins d’affection et de confiance les uns pour les autres, et de tout temps rivaux d’honneur et de courage. Ils se trouvèrent au nombre de douze ; après avoir fait leurs adieux à ceux qui restaient là, ils envoyèrent un messager à Charon, et partirent vêtus de petits manteaux, ayant avec eux des chiens de chasse et des pieux à tendre les filets, afin que ceux qu’ils rencontreraient par le chemin ne pussent concevoir aucun soupçon, et qu’ils crussent, en les voyant les uns d’un côté, les autres d’un autre, que c’étaient des hommes qui se promenaient en chassant. Lorsque le messager arriva chez Charon, et lui apprit qu’ils étaient en route, Charon, tant s’en faut, ne changea pas de sentiments à l’approche du danger ; il se montra homme

  1. Bourgade près du mont Cithéron.