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fient un chien. Un certain Butas[1] a fait des vers élégiaques sur les coutumes des Romains ; mais ses origines ne sont que fables. Il dit que Romulus, après avoir vaincu Amulius, courut, transporté de joie, jusqu’au lieu où, petits enfants, la louve leur avait donné la mamelle ; que cette fête est une imitation de sa course, et que les jeunes gens de noble maison courent,

Frappant devant eux, comme, l’épée à la main,
S’élançaient d’Albe Romulus et Rémus
[2].

Il ajoute que la cérémonie de toucher le front avec un couteau ensanglanté est une allusion au carnage et aux périls de cette journée. Pour l’ablution de lait, elle rappellerait la première nourriture des deux frères.

Caïus Acilius[3] raconte qu’avant la fondation de Rome, Romulus et son frère perdirent un jour la trace de leur troupeau ; qu’après avoir fait leur prière au dieu Faune, ils se dépouillèrent de leurs habits, pour courir à la recherche sans être incommodés par la chaleur, et que c’est pour cela que les Luperques courent tout nus. Quant au chien immolé dans la fête, on pourrait dire, si cette fête est réellement un jour d’expiation, que c’est à titre de victime propre à purifier : en effet, les Grecs eux-mêmes se servent de ces animaux pour de semblables sacrifices ; et rien n’est fréquent chez eux comme les Périscylacismes[4]. Si c’est un acte de reconnaissance envers la louve qui nourrit et sauva Romulus, ce n’est pas sans raison qu’on immole un chien, l’ennemi né des loups : peut-être aussi punit-on cet animal de ce qu’il trouble les Luperques dans leurs courses.

On dit que Romulus institua le culte du feu sacré, et

  1. Poëte grec, inconnu d’ailleurs.
  2. Le poëte, ici, dit Remus et non pas Romus.
  3. Caïus Acilius Glabrio, qui fut tribun du peuple l’an de Rome 556. Il avait écrit en grec une histoire de Rome intitulée Annales.
  4. C’est-à-dire les sacrifices de chiens, conduits d’abord en cérémonie.