Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/402

Cette page a été validée par deux contributeurs.

imprimé, sur le front des leurs, la figure d’une samine. La samine était un navire dont la proue n’était point saillante, et dont les flancs étaient larges et renflés ; ce qui le rendait très-facile à la manœuvre, et en même temps très-léger. Cette espèce de navire était appelé samine, parce que le premier avait été construit à Samos, sous la direction du tyran Polycrate[1]. C’est à ces stigmates des captifs que fait allusion, dit-on, le vers d’Aristophane :

Comme le peuple de Samos est fort sur les lettres !

Périclès apprit cet échec, et il revint en toute hâte au secours des siens. Il rencontra Mélissus, qui venait lui offrir le combat : il le vainquit, le mit en déroute ; et, déterminé à briser la résistance des assiégés, et à prendre la ville, mais préférant la dépense de temps et d’argent à tout sacrifice d’hommes, il enferma la place par un mur de circonvallation. Mais, comme les Athéniens eux-mêmes s’ennuyaient de la longueur du siège[2], qu’ils demandaient à combattre, et qu’il était fort difficile de les contenir, il divisa toutes ses troupes en huit corps, et il les fit tirer au sort : celui des huit qui amenait une fève blanche[3] n’avait qu’à se reposer et faire bonne chère, tandis que les autres combattaient. De là vient que ceux qui ont passé la journée dans les plaisirs disent qu’ils ont eu un jour blanc, à cause de la fève blanche de Samos. Éphore raconte qu’à ce siège, Périclès employa des machines de guerre. Il s’était passionné pour cette invention nouvelle, due au mécanicien Artémon. Artémon était avec lui ; et, comme il était boiteux, et qu’il se faisait porter en litière aux endroits où les

  1. Celui qu’Orœtès, satrape de Cambyse, prit en trahison et fit mettre en croix.
  2. Ce siège durait déjà depuis près de neuf mois.
  3. De temps immémorial, dans les tribunaux athéniens, la fève blanche était le signe de l’absolution.