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tout le pays ennemi le ravage et la dévastation. Il retourna à Athènes, après s’être montré capitaine redoutable, aux ennemis de sa patrie, et, à ses concitoyens, protecteur sûr et actif de leur vie et de leur fortune. Ses troupes n’avaient essuyé aucun accident fâcheux, même fortuit.

Il mit ensuite à la voile pour le Pont, menant une flotte nombreuse et magnifiquement équipée. Là, il rendit aux villes grecques tous les services qu’elles réclamèrent : il les traita avec beaucoup d’humanité, en même temps qu’il déployait aux yeux des nations barbares du voisinage, de leurs rois, de leurs princes, la grandeur des Athéniens, la sécurité avec laquelle ils naviguaient dans tous les parages où il leur plaisait de se présenter, leur confiance fondée sur l’empire des mers qu’ils avaient su conquérir. Il laissa aux habitants de Sinope[1] treize vaisseaux, ainsi que les soldats qui les montaient, sous la conduite de Lamachus, pour les assister dans une lutte contre le tyran Timésiléon[2] ; et, lorsque le tyran et ses amis eurent été chassés de la ville, il fit décréter qu’une colonie de six cents Athéniens volontaires serait transportée à Sinope, pour s’y confondre avec l’ancienne population, et pour se partager les maisons et les terres qu’y avait possédées la faction du tyran.

Cependant Périclès ne cédait pas à tous les caprices de ses concitoyens ; et il se gardait de faillir avec eux, lorsque, aveuglés et enorgueillis de leur puissance et de leurs succès, il les voyait se prendre à l’idée de faire une nouvelle tentative sur l’Égypte, et d’attaquer les provinces maritimes du roi de Perse. Déjà beaucoup avaient conçu leur malheureux amour pour la Sicile, funeste passion que, plus tard, enflammèrent dans tous les cœurs les discours d’Alcibiade. Il y en avait même qui rêvaient la conquête de l’Étrurie et du pays de Carthage.

  1. Ville de la Paphlagonie, sur le Pont-Euxin.
  2. Ce Timésiléon n’est pas connu d’ailleurs.