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vait point, mais que même elle voulait, en quelque sorte, y mettre la main, et concourir à leur achèvement. Celui des artistes qui montrait le plus de diligence et d’activité, se trouvant au haut de l’édifice, glissa et tomba à terre : la chute fut si violente, que les médecins jugèrent la guérison du blessé impossible. Périclès était douloureusement affecté de cet accident ; mais la déesse lui apparut en songe, et elle lui enseigna un remède qu’il employa, et qui apporta à cet homme une guérison prompte et facile. C’est pour cela que Périclès fit couler en bronze la statue de Minerve Hygie[1], qu’il plaça dans l’Acropole, auprès de l’autel qui s’y trouvait, dit-on, auparavant.

C’est Phidias qui fit la statue d’or de la déesse ; et le nom de l’artiste est gravé sur le socle. Il avait, avons-nous dit, la direction de tous les travaux, et la surveillance de tous les artistes employés à l’œuvre : honneur qu’il devait à l’amitié de Périclès. De là, mille jalousies contre l’un, mille bruits injurieux contre l’autre. Ainsi l’on disait que Phidias recevait chez lui des femmes de condition libre, qui s’y rendaient sous prétexte de visiter les travaux, et qu’il les livrait à Périclès. Les auteurs comiques ne manquèrent pas d’accueillir ces rumeurs, pour verser sur Périclès le sarcasme et l’injure. « Il vit, disaient-ils, avec la femme de Ménippus, son ami et son lieutenant. Pyrilampe est l’ami intime de Périclès : il élève des oiseaux, il nourrit des paons ; et c’est pour en faire de petits présents aux femmes dont Périclès obtient les faveurs. » Mais comment s’étonner que des hommes qui font métier de médire portent en offrande à la haine du peuple, ainsi qu’à un génie malfaisant, des calomnies contre tout ce qui se montre supérieur ; comment s’en étonner, dis-je, quand on entend Stésimbrote de Thasos oser articuler, contre Périclès, une accusation horrible, fabuleuse : celle d’entretenir la femme de son propre fils !

  1. C’est-à-dire qui donne la santé.