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lui, criait-on, de combattre à pied ou à cheval : on voulait seulement ses conseils pour la conduite de la guerre. Il fut donc obligé de prendre le commandement des troupes ; et, assisté de Lucius Furius[1], un de ses collègues, il les mena à l’ennemi : c’étaient les Prénestins et les Volsques, lesquels ravageaient, avec une armée nombreuse, les terres des alliés des Romains. Camille se mit en marche, et il alla camper à côté de leur camp même. Son intention était de traîner l’affaire en longueur, afin que, s’il fallait en venir à une bataille, il eût le temps de rétablir sa santé, et de se mettre en état de combattre ; mais Lucius, son collègue, emporté par le désir de la gloire, brûlait d’impatience d’en venir aux mains, et son ardeur se communiquait à tous les chefs, centurions et manipulaires. Camille craignit qu’on ne le soupçonnât d’avoir ôté à des jeunes gens, par envie, une occasion de vaincre et de se distinguer : il permit à Lucius, mais à regret, de livrer bataille ; pour lui, retenu par la maladie, il resta dans le camp, avec un petit nombre de soldats.

Lucius chargea témérairement les ennemis, et il fut bientôt repoussé. Camille, voyant les Romains prendre la fuite, ne put se contenir : il saute de son lit ; et, avec ce qu’il avait de troupes, il court aux portes du camp, passe au travers des fuyards, et tombe sur ceux qui les poursuivaient. Alors ceux des Romains qui étaient déjà rentrés dans le camp reviennent sur leurs pas, pour suivre Camille ; et les fuyards qui étaient encore dans la plaine se rallient autour de lui, et ils prennent leur rang de bataille, s’exhortant les uns les autres à ne pas abandonner leur général. Les ennemis, ce jour-là, suspendirent leur chasse. Le lendemain, Camille fait avancer son armée, les charge et les met en tuile ; il entre dans leur camp avec les fuyards, et presque tous sont massacrés. Il ap-

  1. C’était probablement un de ses parents.