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COMPARAISON DE SOLON ET DE PUBLICOLA.


COMPARAISON
DE
SOLON ET DE PUBLICOLA.


Il y aura, dans le parallèle de Solon et de Publicola, une particularité, et qui ne se rencontre dans aucun de ceux que j’aie écrits encore : c’est que l’un est l’imitateur, et l’autre le témoin de celui auquel je le vais comparer[1]. Prenez garde, en effet, que cette maxime sur le bonheur, proférée par Solon en présence de Crésus, convient mieux à Publicola qu’à Tellus. Ce Tellus, qui avait été, suivant Solon, le plus heureux des hommes, à cause de sa mort glorieuse, de sa vertu, et des enfants estimables qu’il laissait après lui, n’est pas cité comme un homme de bien, même dans les poésies de Solon ; enfin ses enfants n’ont pas été connus, et lui-même n’a exercé aucune magistrature. Au contraire, Publicola, pendant sa vie, fut, par son crédit comme par l’éclat de ses vertus, le premier des Romains ; et, encore de nos jours, six cents ans après sa mort, les plus illustres familles de Rome, les Publicola, les Messala, et les autres Valérius, font remonter à lui la gloire de leur noblesse. Tellus fut tué par les ennemis, et il mourut en brave, ferme à son poste, dans la mêlée ; tandis que Publicola, après avoir taillé en pièces les ennemis, ce qui est bien plus heureux que de tomber sous leurs coups, et après avoir vu, lui consul, et par ses efforts, sa patrie victorieuse, comblé

  1. Cette expression, un peu alambiquée et obscure, s’éclaircira plus loin.