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PUBLICOLA.

jusqu’à défendre à ses troupes d’emporter autre chose que leurs armes, et il abandonna aux Romains toutes les provisions, toutes les richesses qui étaient dans son camp. Aussi, de nos jours encore, lorsqu’on vend, à Rome, des biens qui appartiennent à l’État, on commence la criée par ces mots : Biens de Porsena ! honneur qui consacre, par une reconnaissance éternelle, la libéralité de ce roi. On lui érigea aussi, non loin de la salle du sénat, une statue de bronze. Elle est grossièrement travaillée, et d’un style antique[1].

Peu de temps après, les Sabins entrèrent en armes sur le territoire de Rome. On nomma consuls Marcus Valérius, frère de Publicola, et Postumius Tubertus ; et, comme rien d’important ne se faisait que par le conseil et sous les yeux de Publicola, Marcus remporta deux grandes victoires. Dans la dernière, il ne perdit pas un seul homme, et il tua treize mille ennemis[2]. On ne se borna point, pour l’en récompenser, à lui décerner les honneurs du triomphe : on lui bâtit, aux dépens du trésor, une maison sur le mont Palatin. Cette maison avait cela de particulier, qu’au lieu que les portes des autres maisons s’ouvraient alors en dedans, les siennes s’ouvraient sur la rue : distinction qui marquait à chaque instant que le public eût voulu la maison plus grande encore. On dit qu’en Grèce, toutes les maisons s’ouvraient ainsi jadis ; et on le conjecture d’après les comédies, où ceux qui veulent sortir frappent en dedans leur porte, et la font bruire, afin que les passants, ou les personnes qui pourraient être arrêtées devant la maison, soient avertis au dehors, et qu’ils tirent de côté avant que les battants s’avancent sur la rue.

L’année suivante, Publicola fut nommé consul pour la quatrième fois. Les Sabins s’étaient unis avec les

  1. Plutarque est le seul auteur qui parle de cette statue.
  2. On a déjà pu remarquer que les Romains ne se faisaient pas faute d’embellir et d’exagérer les victoires de leurs anciens héros.