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Psénophis l’Héliopolitain et Sonchis le Saïte, les plus savants d’entre les prêtres. C’est d’eux qu’il entendit, suivant Platon, le récit sur l’Atlantide[1], qu’il se proposa de mettre en vers, pour le faire connaître aux Grecs.

De là il passa en Cypre, où il se lia d’amitié avec Philocyprus, un des rois de l’Île, qui habitait une petite ville bâtie par Démophon, fils de Thésée, près du fleuve Clarius. C’était un endroit fort d’assiette, mais, du reste, un terrain stérile et ingrat. Solon persuada au roi de transporter la ville dans une belle plaine située plus bas, et de l’agrandir en la rendant plus agréable. Il aida même à la construire, et à la pourvoir de tout ce qui pouvait y faire régner l’abondance et contribuer à sa sûreté. Philocyprus eut bientôt un si grand nombre de sujets, qu’il encourut la jalousie des rois voisins. Aussi, par une juste reconnaissance pour Solon, donna-t-il à sa ville, qui s’appelait d’abord Épia[2], le nom de Soli. Solon parle lui-même de cette fondation. Voici comment il s’adresse à Philocyprus, dans ses Élégies :

Puisses-tu régner ici, à Soli, de longues années,
Paisible dans ta ville, toi et tes descendants !
Pour moi, que mon rapide vaisseau, loin de cette île célèbre,
M’emporte sain et sauf, protégé par Cypris à la couronne de violettes.
Puisse cette fondation me valoir, par la déesse, reconnaissance, gloire
Illustre, et un heureux retour dans ma patrie !

Quelques-uns regardent comme controuvée son entrevue avec Crésus, et ils prétendent en prouver l’anachronisme. Pour moi, je suis d’avis qu’un trait aussi fameux, et que confirment un si grand nombre de témoignages, si analogue d’ailleurs aux mœurs de Solon, et si digne de sa grandeur d’âme et de sa sagesse, ne doit pas être rejeté par la seule raison qu’il ne s’accorde point avec telles

  1. Voyez le Timée et le Critias.
  2. C’est-à-dire Élevée.