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volontairement. Une loi particulière à Solon, c’est l’institution des repas aux frais du public, ce qu’il nomme parasiter[1]. Il défend que le même y aille souvent, et il établit une peine contre qui n’y va pas à son tour. L’un, à ses yeux, était pure avidité, et l’autre, mépris des coutumes publiques.

Solon fixa cent ans de durée à l’autorité de ses lois, et on les écrivit sur des pièces de bois en forme d’essieux, qui tournaient dans les cadres où elles étaient enchâssées. On en conserve encore quelques petits fragments, dans le Prytanée ; et, suivant Aristote, ces essieux portaient le nom de cyrbes. Le poète Cratinus[2] a dit aussi quelque part :

Par Solon et Dracon, dont aujourd’hui
Les cyrbes nous font déjà frire les grains d’orge.


Quelques-uns prétendent qu’on ne donnait le nom de cyrbes qu’aux tables où se trouvaient les règlements des cérémonies de la religion et des sacrifices : les autres étaient simplement appelées tables. Le conseil s’engagea, par un serment commun, à maintenir les lois de Solon ; et chacun des Thesmothètes[3] fit en particulier le même serment sur la place publique, près de la pierre des proclamations, s’obligeant, s’il venait à transgresser une seule de leurs dispositions, de consacrer, dans le temple de Delphes, une statue d’or de son poids.

Solon avait remarqué l’inégalité des mois ; il avait vu que jamais le mouvement de la lune ne s’accorde ni avec le lever du soleil, ni avec son coucher, et que souvent, en un même jour, elle atteint et devance le soleil. Il régla que ce jour serait appelé vieille et nouvelle lune[4] ; et

  1. Le mot grec est détourné ici de son acception ordinaire : il signifie proprement dîner chez quelqu’un, et il se prend presque toujours en mauvaise part.
  2. Poëte de l’ancienne comédie, contemporain d’Aristophane.
  3. Ce mot signifie législateurs ; c’est le titre qu’on donnait aux six derniers archontes.
  4. En grec, ἕνη καὶ νὲα.