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dérober aux Macédoniens, à la faveur des ténèbres, ce que le combat aurait de plus effrayant. Alexandre lent répondit ce mot devenu depuis si célèbre : « Je ne dérobe pas la victoire. » Quelques personnes ont trouvé cette réponse vaine et puérile et n’approuvent pas qu ’Alexandre se soit joué d’un danger si grand. D’autres y ont vu une noble confiance sur le présent, et une sage prévoyance de l’avenir, qui ôtait à Darius, après sa défaite, le prétexte de reprendre courage et de tenter encore la fortune, en accusant de cette seconde déroute la nuit et les ténèbres, comme il avait attribué la première aux montagnes, aux défilés et au voisinage de la mer. Il sentait bien que ce ne serait jamais le défaut d’armes et de soldats qui obligerait Darius, maître d’une si grande puissance et d’un empire si vaste, à ne plus faire la guerre ; et qu’il n’y renoncerait que lorsqu’une victoire remportée sur lui par la force seule et en plein jour, en le convainquant de sa faiblesse, aurait abattu sa fierté et détruit ses espérances. Quand ses officiers se furent retirés, il se coucha dans sa tente ; et, contre sa coutume, il dormit, dit-on, toute la nuit du sommeil le plus profond. Lorsque ses capitaines se rendirent le lendemain de très bonne heure à sa tente, ils furent fort surpris de le trouver