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qui lui faisaient ainsi leur cour ; cet homme lui apporta sa petite biche, que Sertorius reçut sans montrer beaucoup de satisfaction de ce présent ; mais l’ayant ensuite tellement apprivoisée qu’elle venait à sa voix, et le suivait partout sans être jamais effarouchée du tumulte du camp, ni du bruit des soldats, il en vint peu à peu à la diviniser, pour ainsi dire ; il débita que cette biche était un présent de Diane ; et connaissant l’empire de la superstition sur les Barbares, il leur fit accroire que cet animal lui découvrait bien des choses cachées. Il employait l’artifice pour accréditer ces bruits. Était-il informé par quelque avis secret, que les ennemis avaient fait une incursion sur les terres de sa province, ou qu’ils avaient sollicité une ville à la défection, il feignait d’en avoir été averti par la biche pendant son sommeil, et d’avoir reçu d’elle l’ordre de tenir ses troupes prêtes à combattre. Apprenait-il qu’un de ses lieutenants avait eu quelque avantage, il défendait au courrier de se montrer, faisait paraître en public sa biche couronnée de fleurs, pour marquer qu’il avait reçu une heureuse nouvelle ; et pour animer le courage de ses soldats, il les exhortait à faire des sacrifices aux dieux, en leur promettant qu’ils apprendraient bientôt quelque heureux succès.