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le nom de Sertorius : à peine de retour à Rome, il fut nommé questeur pour la Gaule des environs du Pô ; et ce choix ne pouvait être fait plus à propos. La guerre des Marses venait de s'allumer ; Sertorius eut ordre de lever des troupes et de faire forger des armes. Le zèle et l'activité qu'il mit à cette double commission, comparés à la lenteur et à la mollesse des autres jeunes officiers, firent juger dès lors qu'il serait toute sa vie un homme prompt et expéditif. Parvenu au grade de capitaine, il ne relâcha rien de l'audace qu'il avait montrée étant simple soldat : il fit des actions admirables, et en s'exposant sans ménagement dans les combats, il perdit un oeil ; mais loin de rougir de cette difformité, il s'en fit toujours honneur. Il disait que les autres ne portaient pas continuellement les témoignages de leur valeur, et qu'ils quittaient souvent les colliers, les piques et les couronnes qu'ils avaient reçus, au lieu qu'il avait sans cesse sur lui les marques de son courage, et qu'on ne voyait point la perte qu'il avait faite sans être en même temps le spectateur de sa vertu. Aussi le peuple lui rendit-il un honneur digne de ses services. La première fois qu'il parut au théâtre, il fut reçu avec les applaudissements et les acclamations de tous les spectateurs : distinction qu'on accordait difficilement