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Sylla lui-même par ses succès. Tout banni qu’il était, et commandant à des Barbares dans une terre étrangère, il tint tête à toute la puissance des Romains. Entre les capitaines grecs, je n’en vois point qu’on puisse mieux lui comparer qu’Eumène de Cardie(3) ; ils furent tous deux d’habiles généraux, et joignirent la ruse à la valeur. Bannis de leur patrie, et chefs de troupes étrangères, ils éprouvèrent également les rigueurs de la fortune dans la mort violente et injuste qu’ils reçurent l’un et l’autre des mains mêmes des compagnons de leurs victoires.

II. Sertorius, né d’une famille peu distinguée dans la ville de Nursie, au pays des Sabins, perdit son père en bas âge, et fut très bien élevé par sa mère, qu’il aima toujours avec une extrême tendresse ; elle s’appelait Rhéa. Il s’exerça d’abord à plaider, et jeune encore il y réussit assez pour se faire, par son éloquence, une grande réputation dans Rome ; mais bientôt l’éclat de ses succès militaires tourna du côté des armes toute son ambition. Il fit sa première campagne sous Cépion, lorsque les Cimbres et les Teutons se répandirent dans les Gaules, et que les Romains furent entièrement défaits. Après la déroute, Sertorius, qui avait eu un cheval tué sous lui, et qui était lui-même blessé, traversa le Rhône à la nage, armé de sa cuirasse et de