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nommé Ancharius, qui avait été préteur, étant venu le saluer et Marius ne lui ayant rien répondu, ils l'égorgèrent à ses pieds. Ce fut dès lors un signal pour massacrer dans les rues tous ceux à qui Marius ne rendait point le salut ou n'adressait pas la parole ; aussi ses amis eux-mêmes ne l'abordaient-ils qu'avec une frayeur extrême. Cinna, rassasié de sang, voulait mettre fin à tant de meurtres ; mais Marius, plus aigri chaque jour, plus altéré de vengeance, continuait de faire égorger tous ceux qui lui étaient suspects. On voyait sur tous les chemins et dans toutes les villes des gens courir, comme des chiens de chasse, à la poursuite de ceux qui s'étaient cachés ou qui avaient pris la fuite. On éprouva, dans cette occasion, que la fidélité aux liens de l'hospitalité et de l'amitié résiste rarement à la mauvaise fortune, car on vit peu de personnes ne pas dénoncer ceux qui étaient venus leur demander un asile. C'est aussi ce qui rend plus dignes de notre admiration et de notre estime les esclaves de Cornutus, qui, ayant caché leur maître dans sa maison, prirent un de ceux qu'on avait tués dans la rue, le pendirent par le cou, lui mirent au doigt un anneau d'or, et le montrèrent aux satellites de Marius ; après quoi, l'ensevelissant comme si c'eût été leur maître, ils l'enterrèrent sans que