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peu de jour, et qu'elle était fort obscure, le cavalier, à ce qu'on assure, crut voir des traits de flamme s'élancer des yeux de Marius ; et de ce lieu ténébreux il entendit une voix terrible lui dire : « Oses-tu, misérable, tuer Caïus Marius ! » À l'instant le Barbare prend la fuite, et jetant son épée, il sort dans la rue, en criant ces seuls mots : « Je ne puis tuer Gaïus Marius. » L'étonnement d'abord, ensuite la compassion et le repentir, gagnèrent bientôt toute la ville. Les magistrats se reprochèrent la résolution qu'ils avaient prise, comme un excès d'injustice et d'ingratitude envers un homme qui avait sauvé l'Italie, et à qui l'on ne pouvait sans crime refuser du secours. « Qu'il s'en aille, disaient-ils, errer où il voudra, et accomplir ailleurs sa destinée ; et prions les dieux de ne pas nous punir de ce que nous rejetons de notre ville Marius, nu et dépourvu de tout secours. » D'après ces réflexions, ils se rendent en foule dans sa chambre, et l'ayant tous environné, ils le font sortir, et le conduisent au bord de la mer. Comme chacun lui donnait de bon cœur ce qui pouvait lui être utile, il se passa un temps assez considérable ; d'ailleurs il y a, sur le chemin qui mène à la mer, le bois sacré de la nymphe Marica, singulièrement respectée de tous les Minturniens, qui ont grand soin de n'