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de mort cet acte d’humanité, sans en excepter un frère, un fils ou un père. Il alla même jusqu’à payer un homicide deux talents, fût-ce un esclave qui eût tué son maître, ou un fils qui eût été l’assassin de son père. Mais ce qui parut le comble de l’injustice, c’est qu’il nota d’infamie les fils et les petits-fils des proscrits, et qu’il confisqua leurs biens. Les proscriptions ne furent pas bornées à Rome ; elles s’étendirent dans toutes les villes d’Italie. Il n’y eut ni temple des dieux, ni autel domestique et hospitalier, ni maison paternelle, qui ne fût souillée de meurtres. Les maris étaient égorgés dans le sein de leurs femmes, les enfants entre les bras de leurs mères ; et le nombre des victimes sacrifiées à la colère ou à la haine n’égalait pas à beaucoup près le nombre de ceux que leurs richesses faisaient égorger. Aussi les assassins pouvaient-ils dire : « Celui-ci, c’est sa belle maison qui l’a fait périr ; celui-là, ses magnifiques jardins ; cet autre, ses bains superbes. » Un Romain nommé Quintus Aurélius, qui ne se mêlait de rien, et qui ne craignait pas d’avoir d’autre part aux malheurs publics que la compassion qu’il portait à ceux qui en étaient les victimes, étant allé sur la place, se mit à lire les noms