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CATON.

de l’affront qu’il avait reçu. Caton chassa aussi du sénat Manilius, que l’opinion publique désignait pour consul de l’année suivante ; et il le fit, parce qu’il avait donné en plein jour un baiser à sa femme devant sa fille. Il disait que la sienne ne l’avait jamais embrassé que lorsqu’il faisait de grands éclats de tonnerre ; et il ajouta, en plaisantant, qu’il n’était heureux que lorsque Jupiter tonnait. Mais il fut soupçonné d’envie lorsqu’il ôta le cheval au frère du grand Scipion, à Lucius, qui avait reçu les honneurs du triomphe : on crut qu’il ne l’avait fait que pour insulter à la mémoire de Scipion l’Africain.

XXVI. Mais ce qui offensa le plus généralement dans l’exercice de sa censure, ce fut la réforme qu’il porta sur les objets de luxe. L’impossibilité qu’il vit à le détruire, en l’attaquant de front dans une si grande multitude qui en était infectée, l’obligea, pour ainsi dire, de le prendre de biais, et de l’attaquer en détail. Il fit estimer les habillements, les voitures, les ornements des femmes, avec tous leurs autres meubles ; chacun de ces objets qui valait plus de quinze cents drachmes[1] était porté à une valeur décuple ; et il en réglait la taxe d’après cette estimation. Sur mille as, il en faisait payer

  1. 1350 livres de notre monnaie.