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le premier de sa cour. Ce Barbare ne se piquait ni de franchise, ni de droiture ; fourbe et dissimulé, la méchanceté dans les autres était un titre à sa prédilection. Il admirait donc la souplesse de son nouvel hôte, et son extrême facilité à prendre toutes sortes de formes. Alcibiade, il est vrai, savait attacher tant de charmes à sa société, il étalait tant de grâce dans ses entretiens, qu’il n’y avait point de caractère qui pût lui résister et qu’il ne parvînt à maîtriser ; ceux mêmes qui le craignaient et qui étaient jaloux de lui trouvaient dans son commerce de l’attrait et du plaisir. Tisapherne donc, quoique d’un naturel sauvage, et plus ennemi des Grecs qu’aucun autre Perse, fut tellement séduit par les flatteries d’Alcibiade, qu’il se livra entièrement à lui, et qu’il le flattait beaucoup plus lui-même qu’il n’en était flatté ; au point que le plus beau de ses domaines, le plus délicieux par l’abondance de ses eaux, par la fraîcheur de ses prairies, par le charme des retraites solitaires qu’on y avait ménagées, par les embellissements de tout genre qu’on y avait prodigués avec une magnificence royale, il le nomma Alcibiade ; nom que tout le monde lui a donné depuis. Alcibiade, qui n’espérait plus de sûreté auprès des Spartiates, et qui craignait le ressentiment d’Agis,