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et le siège où il rendait la justice comme prêteur de billets conçus la plupart en ces termes : « Tu dors, Brutus ! Tu n’es pas Brutus ! » Cassius, qui s’aperçut que ces reproches réveillaient insensiblement en Brutus un vif désir de gloire, le pressa lui-même beaucoup plus qu’il n’avait fait encore ; car il avait contre César des motifs particuliers de haine, que nous ferons connaître dans la vie de Brutus. Aussi César, qui avait des soupçons sur son compte, dit-il un jour à ses amis : « Que croyez-vous que projette Cassius ? Pour moi, il ne me plaît guère, car je le trouve bien pâle. » Une autre fois on accusait auprès de lui Antoine et de Dolabella de tramer quelques nouveautés. « Ce n’est pas, dit-il, ces gens si gras et si bien peignés que je redoute ; je crains plutôt ces hommes si pâles et si maigres. » Il désignait Brutus et Cassius.

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Mais il est bien plus facile de prévoir sa destinée que de l’éviter ; celle de César fut, dit-on, annoncée par les présages et les prodiges les plus étonnants. À la vérité, dans un événement de cette importance, les feux célestes, les bruits nocturnes qu’on entendit en plusieurs endroits, les oiseaux solitaires qui vinrent, en plein jour, se poser sur la place de Rome, ne sont pas des signes assez frappants