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cet astre fût sa magnifique image ainsi que la lune, de même dans les cités le souverain est l’imitation de Dieu, son lumineux reflet, "Et doit, en devenant son image fidèle, Rendre bonne justice à la race mortelle". Ce qui prouve que Dieu prend le souverain pour son organe, ce sont les pensées qui animent te souverain, et non pas un sceptre, un tonnerre, un trident : comme quelques princes en font donner aux statues ou aux peintures par lesquelles ils veulent qu’on les reproduise, rendant odieuse ainsi leur folle prétention de posséder ce à quoi ils ne peuvent atteindre. Dieu n’a que du courroux contre ceux qui veulent singer son tonnerre, sa foudre et ses carreaux. Mais que des souverains se piquent d’imiter sa vertu, de lui ressembler par ce qu’il a de beau et de dévoué à l’humanité, dès lors il se plaît à les grandir davantage, et partage avec eux ses trésors d’équité, de justice, de vérité, de douceur : trésors que n’égalent, pour leur caractère divin, ni le feu, ni la lumière, ni la course du soleil, ni le lever ou le coucher des astres, ni l’éternité, ni l’immortalité. Car ce n’est point par la durée de son existence que Dieu est souverainement heureux, mais bien par l’empire qu’exerce sa vertu. C’est ce dernier attribut qui est vraiment divin, et qui communique sa beauté à ce qui est soumis à sa loi.

[4] Anaxarque, voulant consoler Alexandre du désespoir où le meurtre de Clitus avait plongé ce prince, lui disait que la Justice et Thémis siégent aux côtés de Jupiter, afin que tous les actes d’un roi semblent empreints d’équité et de justice. » Consolation aussi déraisonnable que pernicieuse ! C’était vouloir calmer le repentir que lui inspirait son crime, et l’encourager à en commettre encore de pareils. S’il faut admettre la vraisemblance de telles conclusions, Jupiter n’a pas l’équité pour assesseur ; c’est lui