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À UN PRINCE IGNORANT[1].

1. Platon refusa de rédiger des lois pour les habitants de Cyrène amollis par la prospérité. Il est difficile de donner des conseils aux rois, parce qu’ils craignent l’empire de la raison.

2. Les souverains ressemblent aux colosses, qui au dehors peuvent paraitre des divinités, et en dedans ne sont qu’un amas de pierre, de terre et de plomb. Il faut que le prince commence par se régler lui— même, afin de pouvoir régler les autres.

3. C’est à la loi qu’il est donné d’êira reine des souverains. Le roi est le ministre des dieux, pour être le dispensateur de leurs bienfaits. Il est l’image de la Divinité. La justice et la clémence sont véritablement des qualités divines.

4. Flatterie criminelle d’Anaxarque. Jupiter est la justice personnifiée. Il faut que les rois craignent le mal en lui-même, et nou pas à cause de ses suites. Exemple de Cléarque, tyran de Pont, et d’Aristodème, tyran d’Argos.

5. Dieu est essentiellement providence gouvernante. La jus tice et la sagesse sont son image, comme l’est le soleil. Alexandre pouvait devenir Diogène, sans cesser d’être Alexandre.

6. La souveraine puissance sert d’aliment et d’instrument à tous les vices si la raison ne la modère et ne la réprime.


[1] Platon avait été invité par les habitants de Cyrène à leur laisser des lois écrites de sa main et à régler l’administration de leur république. Mais il s’en défendit, en disant qu’il était difficile, dans l’état de prospérité où vivaient les Cyrénéens, de rédiger des lois pour eux. « Car il n’est rien d’aussi superbe en somme », d’aussi rebelle, d’aussi difficile à contenter, « Que l’animal qui s’appelle homme »,

  1. Amyot : « Qu’il est requis qu’un prince soit sçavant. »