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parmi les décembristes, par Mouravioff ; elle a passé ensuite aux membres du groupe de Pétrachevsky à Tchernychevsky, à Bakounine et aux « populistes » de l’époque 1870 – 80. Mais, en même temps, comme on le sait, la tendance opposée a également existé – tendance centraliste, qui a trouvé son expression chez le décembriste Pestel et a été, depuis, défendue par de nombreux publicistes et aussi, bien entendu, par le gouvernement autocrate et ses partisans.

Les résultats déplorables de cette tendance apparaissent maintenant.

Dès l’époque où Alexandre III et son successeur, qui, tous les deux, avaient juré fidélité à la constitution finlandaise, ont commencé à l’annihiler systématiquement ; ou, tous les deux, imitant la Prusse, ont fait subir à la population de la Pologne une oppression sans cesse croissante, empêchant même les prêtres catholiques d’enseigner leur religion dans les écoles et chargeant de ce soin les professeurs russes d’histoire et de géographie ; depuis que, sous Nicolas II, on s’est mis à anéantir les derniers vestiges de l’autonomie en Géorgie, de dévaster l’Imeretie et la Gourie à la suite du mouvement révolutionnaire de 1905 ; d’exciter, en Transcaucasie, les uns contre les autres Tartares et Arméniens ; d’organiser des « pogroms » contre les Juifs et de persécuter les Ukrainiens – je me demandais avec terreur : « Que font-ils ? Quelle folie ! Vienne la guerre avec l’Allemagne, et, tous, la Finlande, la Pologne et peut-être le Caucase deviendront ennemis de la Russie et auxiliaires de ses ennemis ! »

Hélas ! c’est ce qui est arrivé. Et il est très naturel qu’actuellement l’idée naisse de la nécessité, pour le peuple russe, de renoncer absolument à vouloir dominer les nationalités qui l’entourent. On se rend compte de plus en plus clairement de l’impossibilité de gouverner d’un centre unique 180 millions d’hommes peuplant des territoires extrêmement variés et d’une étendue dépassant de beaucoup celle de l’Europe entière. On prend de plus en plus nettement conscience de cette vérité que la force créatrice de ces millions d’hommes ne pourra se manifester pleinement que lorsqu’ils se sentiront complètement libres de développer ce que leurs mœurs ont de particulier et de bâtir leur existence conformément à leurs aspirations, aux caractères physiques de leur territoire et à leur passé historique. Ainsi l’idée d’une union fédérative entre les régions et les peuples qui faisaient partie de l’ancien Empire russe se