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SIXIÈME ENNÉADE.


exister et qu’elle rendrait toute science impossible ; mais qui, divisant les êtres dont le nombre est limité, et voyant qu’on ne pouvait considérer ces divisions comme des éléments, en ont fait des genres : quelques-uns [les Péripatéticiens] en ont admis dix, d’autres en ont admis un nombre moindre [comme l’ont fait les Stoïciens], ou un nombre plus grand[1]. Il y a aussi un dissentiment pour les genres : car les uns ont voulu que les genres fussent des principes[2] ; les autres, qu’ils formassent des classes[3].

[Critique des catégories d’Aristote.]

Examinons d’abord la doctrine qui divise les êtres en dix [classes]. Nous rechercherons s’il faut admettre que ses partisans reconnaissent dix genres, qui portent le nom commun de l’être, ou bien dix catégories : car ils disent que l’être n’est pas synonyme dans toutes choses, et ils ont raison[4].

  1. Pour tout le morceau qui précède, Voy. les Éclaircissements sur ce livre à la fin du volume.
  2. C’est l’opinion même de Plotin.
  3. C’est l’opinion d’Aristote, comme l’explique Porphyre : « Le genre est l’attribut essentiel applicable à plusieurs espèces différentes entre elles, comme l’attribut animal… Comme les attributs supérieurs s’appliquent aux termes inférieurs, l’espèce est attribuée à l’individu, le genre l’est à l’espèce et à l’attribut tout ensemble ; le genre le plus générique est attribué au genre ou aux genres, s’il y a plusieurs intermédiaires subordonnés, et à l’espèce, et à l’individu. Le genre le plus générique s’applique et à tous les genres qui sont au-dessous de lui, et aux espèces, et aux individus. Le genre qui précède l’espèce spécialissime s’applique aux espèces spécialissimes et aux individus ; et l’espèce qui n’est qu’espèce s’applique à tous les individus. L’individu ne s’applique qu’à un seul des êtres particuliers... Ainsi donc l’individu est enveloppé par l’espèce ; l’espèce l’est par le genre. Le genre est un tout, l’individu une partie. L’espèce est à la fois tout et partie ; la partie appartient à un autre que soi ; le tout n’est point à un autre, mais dans d’autres : car le tout est dans les parties. » [Introduction aux Catégories, chap. II, trad. de M. Barthélémy Saint-Hilaire, p. 4, et p. 12-13.)
  4. « L’être en soi a autant d’acceptions qu’il y a de catégories ; car autant on en distingue, autant ce sont de significations données à l’être. Or,