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TROISIÈME ENNÉADE.


lettres pour ceux qui savent déchiffrer cette espèce d’écriture, et qui, en considérant les figures formées par les astres, y lisent les événements futurs d’après les lois de l’analogie, comme si, voyant un oiseau voler haut, on en concluait qu’il annonce de hauts faits[1].

VII. Reste à considérer la doctrine qui, enchaînant et liant toutes choses les unes aux autres, fait dériver de cette connexion les qualités de chaque être, et établit une cause unique produisant tout par des raisons séminales (ἀρχὴ μία ἀφ’ ἧς πάντα ϰατὰ λόγους σπερματιϰοὺς περαίνεται (archê mia aph’ hês panta kata logous spermatikous perainetai))[2]. Cette doctrine rentre dans celle qui rapporte à l’action de l’Âme universelle la constitution et les mouvements des individus aussi bien que ceux de l’univers[3]. Dans ce cas, eussions-nous le pouvoir de faire quelque chose par nous-mêmes, nous n’en serions pas moins comme le reste soumis à la

  1. Voy. Enn. II, liv. III, § 7 ; t. I, p. 175 et 464-466.
  2. C’est la doctrine des Stoïciens, comme nous l’avons dit ci-dessus, p. 7, note 3. « Suivant les Stoïciens, dit M. Ravaisson, le monde forme un ensemble où tous les phénomènes sont liés les uns aux autres d’une manière nécessaire. En effet, toute action étant un mouvement, et tout mouvement exigeant une cause qui en rende raison, tous les événements qui se produisent, y compris les résolutions de la volonté, sont les effets d’événements antérieurs ; les phénomènes de tout genre dont se compose l’univers forment donc une chaîne de causes non interrompue dont chaque anneau a sa place déterminée par la nécessité… Comme les destinées de chaque être sont préordonnées dans la raison séminale particulière dont, il est l’expansion, de même les destinées de l’univers entier sont ordonnées à l’avance et de tout temps dans la raison séminale universelle. Cette raison séminale où toutes les causes sont comprises, cette cause de toutes les causes, ce Destin invincible et en même temps cette Providence vigilante, c’est Dieu. » (Sur le Stoïcisme, Mém. de l’Acad. des Inscriptions et Belles-Lettres, t. XXI, p. 63.) Voy. en outre les citations de Cicéron, de Sénèque, etc., que nous avons placées dans le tome I, p. 172 (note 2), 173 (note 3), 183 (note 1), 188 (note 4), 189 (notes 3, 4).
  3. C’est la doctrine d’Héraclite, comme nous l’avons dit ci-dessus, p. 6, note 3.