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QUATRIÈME ENNÉADE.


chons, et on ne peut lui refuser l’immortalité ; ou l’âme est composée, et il faut la décomposer jusqu’à ce qu’on arrive à quelque chose qui soit immortel et se meuve par soi-même ; alors un pareil principe ne saurait être soumis à la mort. Enfin, si l’on dit que la vie n’est qu’une modification accidentelle de la matière (πάθος ἐπαϰτὸν τῇ ὕλῃ), on est forcé de reconnaître que le principe qui a donné à la matière cette modification est immortel et incapable d’admettre rien de contraire à ce qu’il communique [c.-à-d. à la vie][1] ; or, il n’y a qu’une seule nature qui possède la vie en acte.

XII. Soutiendra-t-on que toute âme est périssable[2] ? Dans ce cas, tout devrait être détruit depuis longtemps. Dira-t-on

  1. Plotin fait ici allusion à un passage de Platon : « L’âme n’admettra jamais ce qui est contraire à ce qu’elle apporte toujours avec elle [la vie]. L’âme est donc immortelle… Si ce qui n’est point susceptible de froid était nécessairement exempt de périr, lorsque quelque chose de froid approcherait du feu, il ne s’éteindrait pas, il ne périrait pas, mais il sortirait de là dans toute sa force. Il faut donc nécessairement dire aussi la même chose de ce qui est immortel, etc. » (Phédon, t. I, p. 297 de la trad. de M. Cousin.) Voici comment saint Augustin formule cet argument : « Quod si quisquam non eum interitum dicit formidandum animo, quo efficitur ut nihil sit quod aliquid fuit, sed eum quo dicimus ea mortua quæ vita carent, attendat quod nulla res se ipsa caret. Est autem animus vita quædam, unde omne quod animatum est, vivere, omne autem inanime quod animari potest, mortuum, id est vita privatum, intelligitur. Non ergo potest animus mori. Nam si carere poterit vita, non animus, sed inanimatum aliquid erit. Quod si absurdum est, multo minus hoc genus interitus timendum est animo, quod vitæ certe non est timendum. Nam prorsus si tunc moritur animus quum illum deserit vita illa, ipsa vita quæ hunc deserit multo melius intelligitur animus, ut jam non sit animus quidquid a vita deseritur, sed ea ipsa vita quæ deserit. Quidquid enim vita desertum mortuum dicitur, id ab anima desertum intelligitur ; hæc autem vita, quæ deserit ea quæ moriuntur, quia ipse est animus et se ipsam non deserit, non moritur animus. » (De Immortalitate animœ, 9.)
  2. C’était l’opinion des Stoïciens. Voy. Cicéron, Tusculanes, I, 32.