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LIVRE SEPTIÈME.


extérieurs que l’âme a l’intuition de la sagesse et de la vertu, c’est en rentrant en elle-même, en se pensant elle-même dans sa condition primitive : alors elle éclaircit et elle reconnaît en elle-même des images divines, souillées par la rouille du temps. De même, si un morceau d’or était animé et se dégageait de la terre dont il est enveloppé, après s’être d’abord ignoré parce qu’il ne voyait pas son éclat, il s’admirerait lui-même en se considérant dans sa pureté ; il trouverait qu’il n’avait nul besoin d’une beauté empruntée, et il se regarderait comme heureux de rester isolé de tout le reste[1].

XI. Quel homme sensé, après avoir considéré ainsi la nature de l’âme, pourrait encore douter de l’immortalité d’un principe qui ne tient la vie que de lui-même et qui ne peut la perdre ? Comment l’âme perdrait-elle la vie, puisqu’elle ne l’a pas empruntée d’ailleurs, qu’elle ne la possède pas comme le feu possède la chaleur ? (car, sans être un accident du feu, la chaleur est cependant un accident de sa matière ; aussi le feu périt-il.) Mais, dans l’âme, la vie n’est pas un accident qui vienne s’ajouter à un sujet matériel pour constituer l’âme. En effet, de deux choses l’une : ou la vie est une essence, et une essence de cette nature est vivante par elle-même ; alors, cette essence est l’âme que nous cher-

    formes et des raisons, qu’elle tire d’elle-même toutes les sciences, qu’elle reconnaît en elle-même toutes les formes divines et naturelles. Le P. Thomassin cite le passage de Plotin et fait à ce sujet les réflexions suivantes : « Hallucinatur hic Plotinus : nec enim ideo purgato mentis duntaxat oculo statim veritas intelligitur, quod scientiæ et disciplinæ jam ante in anima sint ; sed quia veritas intelligibilis, semper præsens et animæ semper intima, puro mentis oculo cerni potest, impuro et lippiente non potest. Sed, seposita illa reminiscentiæ absurda opinatione, et re tota huc quo Augustinus præit reflexa, pulcherrima sunt et mirificæ sapientiæ plena Plotini verba. » (Dogmata theologica, t. I, p. 145.) Sur la réminiscence, Voy. ci-dessus, p. 429, note 5.

  1. Voy. Enn. I, liv. VI, § 5 ; t. I p. 106.