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LIVRE SIXIÈME.
DES SENS ET DE LA MÉMOIRE[1].


I. Si nous admettons que les sensations ne sont pas des images imprimées à l’âme et semblables à l’empreinte d’un cachet (τυπώσεις, ἐνσφαγίσεις)[2], nous dirons aussi, pour être conséquents avec nous-mêmes, que les souvenirs ne sont pas des notions ni des sensations conservées dans l’âme par la permanence de l’empreinte, puisque, selon nous, l’âme n’a point reçu d’empreinte dans l’origine. Ainsi, les deux questions n’en font qu’une : où il faut admettre que la sensation consiste dans une image imprimée à l’âme, et le souvenir dans sa conservation ; ou, si l’on rejette l’une de ces deux assertions, il faut également rejeter l’autre. Puisque nous les regardons toutes deux comme fausses, nous avons à chercher comment s’opèrent les deux faits : car nous affirmons que la sensation n’est pas l’impression d’une image, ni le souvenir la permanence de cette image.

Si nous examinons d’abord le sens le plus pénétrant[3], en transportant par induction les mêmes lois aux autres sens, nous trouverons la solution de la question.

  1. Pour les Remarques générales, Voy. les Éclaircissements sur ce livre à la fin du volume.
  2. Cette argumentation est principalement dirigée contre les Stoïciens. Voy. ci-dessus, p. 122, note 2, et p. 317, note 4.
  3. Cette idée paraît empruntée à Aristote : « Comme la vue est le principal de nos sens, l’imagination a reçu son nom de l’image que la lumière nous révèle, parce