Page:Plotin - Ennéades, t. II.djvu/470

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
420
QUATRIÈME ENNÉADE.


au contraire un acte produit par une autre chose, pourquoi, s’il n’y a pas de corps auprès de l’objet lumineux, s’il n’y a que le vide, la lumière n’existerait-elle pas et ne s’étendrait-elle pas aussi au-dessus [comme au-dessous, en rayonnant en tout sens] ? Puisqu’elle s’étend, pourquoi ne se répandrait-elle pas sans être arrêtée ? Si sa nature est de tomber, elle s’abaissera d’elle-même : car ni l’air ni aucun corps éclairé ne la fera sortir du corps éclairant et ne la forcera de s’avancer, puisqu’elle n’est pas un accident qui suppose un sujet, ni une affection qui suppose un objet affecté. Sans cela, la lumière demeurerait [dans le corps éclairé] quand l’objet dont elle émane viendrait à s’éloigner ; mais elle s’éloigne avec lui ; elle s’étend donc. Où s’étend-elle ? Il suffit que le lieu existe [pour qu’elle s’étende] ; sinon, le corps du soleil perdrait son acte, c’est-à-dire la lumière qu’il répand. S’il en est ainsi, la lumière n’est pas la qualité d’un sujet ; c’est l’acte qui émane d’un sujet, mais ne passe pas dans un autre sujet[1] ; seulement, si un autre sujet est présent, il éprouvera une affection. Comme la vie, qui constitue un acte de l’âme, affecte le corps s’il est présent, et n’en constitue pas moins un acte si le corps est absent, de même, la lumière constitue un acte soumis aux mêmes conditions. Ce n’est pas le ténébreux de l’air qui engendre la lumière, ni le ténébreux mêlé à la terre qui produit une lumière impure ; sinon, on pourrait produire le doux en mêlant une chose à l’amer. Si donc on dit que la lumière est une modification (τροπή) de l’air, il faut ajouter que l’air doit être modifié lui-même par cette modification, et que le ténébreux de l’air n’est plus ténébreux après avoir subi ce changement. Quant à l’air, il reste ce qu’il était, comme s’il n’avait pas été affecté. L’affection n’appartient qu’à ce qui est affecté. La couleur n’appartient

  1. Creuzer pense que la théorie développée ici par Plotin a de l’analogie avec l’hypothèse des ondulations.