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SOMMAIRES.


forment par leurs mouvements et des choses que représentent ces figures. D’ailleurs, la puissance de produire des figures douées d’une certaine efficacité est commune à tous les êtres ; tous, étant des membres du grand Animal, doivent, selon leur nature, produire ou subir une action : car la vie est répandue dans le monde entier sous des formes diverses, et tous les êtres tiennent de l’Âme universelle une puissance plus ou moins occulte, puissance qui se manifeste surtout dans les astres.

(XXXVIII-XXXIX) Les faits dont la production est naturelle ont pour cause la puissance végétative de l’univers. Ceux dont la production est provoquée soit par des prières, soit par des enchantements, doivent être rapportés, non aux astres, mais à la nature particulière de ce qui subit l’action. Si l’influence des astres semble quelquefois nuisible, c’est que les êtres qui y sont soumis ne peuvent point, par leur constitution propre, profiter de ce que cette action a de salutaire. Toutes choses sont d’ailleurs coordonnées dans l’univers : c’est pour cela qu’elles sont les signes les unes des autres. Elles relèvent d’une Raison supérieure aux raisons séminales, et elles concourent à la réalisation de son plan par leurs qualités comme par leurs défauts. En tout cas, les astres ne sont pas responsables des maux qui se produisent ici-bas.

En quoi consiste la puissance de la magie ? — (XL-XLI) Les considérations qui précèdent expliquent la puissance de la Magie. Elle est fondée sur la sympathie qui unit entre elles toutes les parties de l’univers, sur les attractions et les répulsions réciproques que la nature a établies entre les êtres. L’univers ressemble à une lyre, où, dès qu’une corde vibre, les autres vibrent à l’unisson. L’harmonie qui y règne est fondée aussi bien sur l’opposition que sur l’analogie des forces multiples qu’il contient. Si les choses se nuisent les unes aux autres, cela tient à leurs différences essentielles : ce n’est pas le vœu de la nature.

(XLII) Les astres n’exaucent nos prières que fatalement, en vertu des lois qui régissent l’univers. Les âmes des astres sont impassibles, aussi bien que l’Âme universelle : car elles ne sauraient subir d’affection physique et leurs corps sont inaltérables.

(XLII-XLIV) La magie n’a point de prise sur l’âme du sage, mais seulement sur son corps. En effet, l’âme échappe aux influences de la magie quand, par la contemplation, elle se concentre en elle-même. Au contraire, si elle se livre à l’activité physique, elle cède dès lors à l’attrait qu’exercent nécessairement sur elle les autres êtres, elle se laisse séduire par les apparences du beau et du bien.

(XLV) Chaque être, par ses actions et ses passions naturelles, concourt à l’accomplissement de la fin de l’univers. Il donne et il reçoit, il est uni à tout

    logues : « Les astres sont animés ou inanimés. S’ils sont inanimés, ce qui n’est pas, comment peuvent-ils produire quelque effet, opérant sans âme ? S’ils sont animés, et que leur action soit divine, comment donnent-ils à l’un la richesse et tous les avantages de ce genre, à l’autre la pauvreté et toutes les autres sortes d’infortunes ? » (Comm. sur le Gorgias, dans M. Cousin, Fragments de Philosophie ancienne, p. 375.) Voy. le développement de cet argument dans l’Enn. II, liv. III, § 3, t. I, p. 167.