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LIVRE TROISIÈME.


parce qu’elles atteignent les mêmes choses, et en les rapportant à un seul et même genre, on nie implicitement qu’elles soient des parties [de l’Âme universelle]. On aurait plus de raison de dire que l’Âme universelle est une et identique, et que chaque âme est universelle [c’est-à-dire est conforme à l’Âme universelle, parce qu’elle en possède toutes les puissances[1]]. Or, si l’on admet que l’Âme universelle est une, on la ramène à être autre chose [que les âmes particulières], c’est-à-dire à être un principe qui, n’appartenant en propre ni à celui-ci ni à celui-là, ni à aucun individu, ni au monde, ni à quoi que ce soit, fait lui-même tout ce que fait le monde ainsi que tout être vivant. Il convient en effet que l’Âme universelle n’appartienne pas à tel ou tel être, puisqu’elle est une essence ; qu’au contraire il y ait une Âme qui n’appartienne en propre absolument à aucun être, et que les âmes particulières appartiennent seules à des êtres particuliers.

Mais il faut expliquer plus clairement dans quel sens on prend ici le mot parties.

D’abord, il ne peut s’agir de parties d’un corps, qu’il soit homogène ou hétérogène ; et nous ne ferons qu’une observation sur ce point, c’est que, pour les corps homogènes, quand on parle de parties, on n’envisage que la masse et non la forme (εἶδος). Prenons pour exemple la blancheur. La blancheur d’une partie de lait n’est pas une partie de la blancheur de tout le lait existant ; c’est la blancheur d’une partie et non une partie de la blancheur : car, prise en général, la blancheur n’a ni grandeur ni quantité. C’est avec ces restrictions seulement qu’on peut dire qu’il y a des parties dans les formes propres aux choses corporelles[2].

Ensuite, lorsqu’il s’agit de choses incorporelles, le mot partie s’entend en plusieurs sens : ainsi l’on dit, en parlant

  1. Voy. Porphyre, Principes de la théorie des intelligibles, § XXXIX ; t. I, p. LXXXI.
  2. Voy. ci-dessus, p. 254, fin.