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TROISIÈME ENNÉADE.


cause de son indigence, et que d’un autre côté il a la faculté d’acquérir à cause de la raison qui entre dans sa nature.

Tous les démons ont une constitution semblable. Chacun d’eux désire et fait acquérir le bien qu’il est destiné à procurer ; c’est là le caractère qui les rend semblables à l’Amour. Ils ne sauraient non plus être rassasiés : ils désirent toujours quelque bien particulier[1]. De là résulte que les hommes qui sont bons ici-bas ont l’amour du Bien absolu, véritable, et non l’amour de tel ou tel bien particuliers Ceux qui sont subordonnés à des démons divers sont subordonnés successivement à tel ou tel démon : ils laissent reposer en eux l’amour pur et simple du Bien absolu, et font présider à leurs actes un autre démon, c’est-à-dire une autre puissance de leur âme, laquelle est immédiatement supérieure à celle qui agit en eux[2]. Quant aux hommes qui, poussés par de mauvais penchants, désirent de mauvaises choses, ils semblent avoir enchaîné tous les amours qui se trouvent dans leur âme, comme ils obscurcissent par de fausses opinions la droite raison qui est innée en eux. Ainsi, les amours mis en nous par la nature et conformes à la nature sont tous bons : ceux qui appartiennent à la partie inférieure de l’âme sont inférieurs par leur rang et leur puissance ; ceux qui appartiennent à la partie supérieure sont supérieurs ; tous sont essentiels à l’âme. Quant aux amours contre nature, ce sont des passions d’âmes égarées ; ils n’ont rien d’essentiel ni de substantiel : car ils ne sont pas engendrés par l’âme pure ; ils sont le fruit des défauts de l’âme qui les produit conformément à ses habitudes et à ses dispositions vicieuses.

En général, il convient d’admettre que les vrais biens, que l’âme possède quand elle agit conformément à sa na-

  1. Voy. ci-dessus, liv. IV, § 6, p. 97.
  2. Voy. ci-dessus, liv. IV, § 3, p. 93.