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LXXXI
PRINCIPES DE LA THÉORIE DES INTELLIGIBLES.

nité de l’Âme ne saurait être morcelée par son union avec un corps, quoique le corps entrave souvent ses opérations. Étant identique, l’Âme fait et découvre tout par elle-même, parce que ses actes sont des espèces, quelque loin que l’on pousse la division. Quand l’Âme est séparée des corps, chacune de ses parties possède tous les pouvoirs que possède l’Âme elle-même, comme une semence particulière a les mêmes propriétés que la semence universelle. De même qu’une semence particulière, étant unie à la matière, conserve les propriétés de la semence universelle, et que, d’un autre côté, la semence universelle possède toutes les propriétés des semences particulières dispersées dans la matière ; ainsi, les parties que l’on conçoit dans l’Âme séparée de la matière possèdent toutes les puissances de l’Âme universelle[1]. L’âme particulière, qui incline vers la matière, est liée à la matière par la forme que sa disposition lui a fait choisir ; mais elle conserve les puissances de l’Âme universelle, et elle s’y unit quand elle se détourne du corps pour se concentrer en elle-même.

Or comme, en inclinant vers la matière, l’âme est réduite à un dénuement complet par l’épuisement total de ses facultés propres, comme au contraire, en s’élevant vers l’intelligence, elle recouvre la plénitude des puissances de l’Âme universelle, les anciens[2] ont eu raison de désigner, dans leur langage mystique, ces deux états opposés de l’Âme sous les noms de Penia et de Poros[3].



LIVRE CINQUIÈME.


L’ÊTRE UN ET IDENTIQUE EST PARTOUT PRÉSENT TOUT ENTIER[4].
L’être incorporel est tout entier en tout.

XL.[5] Pour exprimer le mieux possible la nature propre de l’être incorporel, les anciens[6] ne se contentent pas de dire : il est un : ils ajoutent aussitôt : et tout, comme un objet sensible est un tout.

  1. Cette partie du § XXXIX se rapporte au § 9 du livre IV.
  2. Cette phrase se rapporte au § 16 du livre IV.
  3. Voy. Enn. III, liv. V, § 7-9.
  4. Les § XL-XLVI sont un commentaire du livre V de l’Ennéade VI (L’être un et identique est partout présent tout entier, II).
  5. Le § XL est un commentaire du § 1 du livre V.
  6. Porphyre paraît faire ici allusion à la doctrine de Parménide, que Plotin cite à ce sujet dans le § 4 du livre IV.