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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

9. Démons.

Pour compléter ce que Plotin dit sur les démons (§ 14, p. 296), il est nécessaire de connaître l’idée qu’il se fait lui-même de leur nature.

Voici comment il s’exprime à cet égard :

« Les démons peuvent éprouver des passions par la partie irraisonnable de leur âme. On a le droit de leur attribuer la mémoire et des sens, d’admettre qu’ils sont naturellement susceptibles d’être charmés et attirés [c’est-à-dire d’être soumis au pouvoir de la magie] et d’exaucer les vœux qu’on leur adresse, surtout si ce sont des démons qui se rapprochent de la condition humaine. » (Enn. IV, liv. iv, § 43.)

Quant aux Gnostiques, quelques-uns, comme Basilide et Valentin, professaient une opinion assez singulière au sujet des démons. Ils admettaient que les mauvais esprits s’introduisant dans l’âme pour lui communiquer de mauvais désirs, en constituaient des appendices (προσαρτήματα), et composaient une âme adventice (προσφυής ψυχή). Aussi Clément d’Alexandrie disait que, dans ce système, l’homme, renfermant ainsi toute une armée d’esprits (τοσούτων πνεύματων διαφόρων στρατὸς), ressemblait au cheval de bois des poëtes, cachant dans ses flancs toute un légion d’ennemis[1].

Basilide et Valentin, qui ont tant emprunté aux idées orientales, s’inspiraient ici sans doute de la doctrine de Zoroastre sur les dews (démons), enfants d’Ahrimane et des ténèbres, aussi nombreux que les créatures d’Ormuzd : « Anéantissez les dews qui affaiblissent les hommes et qui produisent les maladies, qui enlèvent le cœur

  1. Clément d’Alexandrie cite à ce sujet un passage intéressant de Valentin : « Valentin, dans une lettre sur les Appendices, s’exprime en ces termes : « Il y a un Être, qui seul est bon, et qui s’est révélé par son Fils. C’est par lui seul que le cœur s’épure en éloignant de lui tous les esprits malins. Il ne peut se sanctifier tant que ces esprits l’occupent : car chacun en lui se livre à ses œuvres, et le corrompt par d’indignes passions. Un tel cœur ressemble à une hôtellerie que bouleversent, que souillent et que profanent des hommes qui n’ont aucun soin de ce qui ne leur appartient pas. C’est ainsi que le cœur reste impur et sert de demeure à une foule de mauvais esprits, tant qu’il n’est l’objet d’aucun soin. Mais dès que le Père, qui seul est bon, a visité ce cœur, il est sanctifié et brille d’une pure lumière. Celui qui possède un tel cœur est heureux : car il verra Dieu. » (Stromates, p. 409.)