Page:Plotin - Ennéades, t. I.djvu/652

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
511
DEUXIÈME ENNÉADE, LIVRE IX.

Avec lui furent produits, en l’honneur des Éons eux-mêmes, les Anges destinés à lui servir des satellites. » (S. Irénée, I, 2.)

3. Achamoth.

« Voici maintenant ce qui se passa hors du Plérôme selon les Valentiniens. L’Enthymesis[1] de Sophia supérieure, à laquelle ils donnent aussi le nom d’Achamoth[2], séparée du Plérôme avec la passion de Sophia supérieure, s’agitait nécessairement dans les Ombres et dans le Cénôme[3]. Elle se trouva seule hors de la lumière et du Plérôme, sans forme comme un avorton, parce qu’elle n’avait rien compris[4]. Touché de son malheur et s’étant étendu sur elle par Stauros[5] [c’est-à-dire lui ayant imposé une limite], Christos lui donna par sa propre vertu la forme de l’essence, mais non la forme de la science ; puis il remonta au Plérôme après avoir rassemblé sa vertu, et il abandonna Achamoth, afin que celle-ci, sentant le malheur d’être hors du Plérôme, souhaitât de s’y élever : car elle avait en elle un parfum d’immortalité que lui avaient laissé Christos et Pneuma ; aussi est-elle appelée, non-seulement Sophia, à cause de son père (l’Éon Sophia supérieure), mais encore Pneuma (à cause de Pneuma, la compagne de Christos).

Ayant reçu une forme et étant devenue intelligente, mais ayant été privée du Verbe qui était en elle d’une façon invisible (de Christos), elle se mit à chercher la lumière qui l’avait abandonnée. Alors Horos se présenta à elle et l’arrêta en criant Iao[6] : ce fut, disent les

  1. Voy. plus haut, p. 508, note 2.
  2. Voy. plus haut, p. 567, note 1.
  3. Cette histoire d’Achamoth paraît n’être qu’une interprétation allégorique du premier chapitre de la Genèse. Achamoth s’agitant dans les ténébres et dans le vide est vraisemblablement une idée empruntée à ce verset : « Terra erat inanis et vacua, et tenebrœ erant super faciem abyssi, et Spiritus Dei ferebatur super aquas. » Les Valentiniens, comme le dit plus bas saint Irénée, donnaient à Achamoth le nom de Pneuma ; ils la considéraient comme l’Âme du monde. Ils s’étaient peut-être inspirés aussi de Platon, selon lequel il y avait eu primitivement une Âme agitée d’un mouvement désordonné, comme nous l’ayons expliqué, p. 428-430. Quant aux Ombres et au Cénôme, Voy. plus haut, p. 500, note 5.
  4. Achamoth n’avait rien compris, c’est-à-dire ne connaissait pas le Plérôme. Cette ignorance fut l’origine de ses passions qui ne cessèrent que lorsque Jésus lui eut donné la forme de la science.
  5. Stauros est ici pour Horos. En effet, saint Irénée dit dans un autre passage (III, 20) : « Is qui ab illis affingitur sursum Christus, superextensus Horo, id est fini, formavit Matrem eorum. » Sur Stauros et Horos, Voy. p. 509, note 1.
  6. C’est un des noms de Dieu en hébreu. On le retrouve dans un des formu-