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DEUXIÈME ENNÉADE, LIVRE III.

ture l’intervalle qui sépare l’animalité de l’humanité, il faut recourir à Celui qui est le premier moteur. Aussitôt donc que l’organisation du cerveau est arrivée à son terme. Dieu jette un regard plein d’amour sur le grand ouvrage qui vient de s’achever, et souffle sur lui un souffle puissant. Le souffle divin attire à soi le principe d’activité qu’il rencontre dans le corps de l’enfant : des deux il se fait une seule substance, une seule âme, qui vit, qui sent et qui se réfléchit elle-même. » (Dante et la Philosophie catholique au treizième siècle, 2e partie, chap. 3.)

Les considérations précédentes nous conduisent à expliquer un passage, obscur à force de concision, qui se trouve dans le livre i de l’Ennéade II (§ 5, p. 150) :

« Pour nous, ayant nos organes formés par l’âme végétative que nous donnent les dieux célestes [les astres] et le ciel même, nous sommes unis au corps par cette âme. En effet, l’autre âme [l’âme raisonnable] qui constitue notre personne, notre moi, n’est pas la cause de notre être [comme l’âme végétative qui fait de nous seulement des animaux], mais de notre bien-être [qui consiste dans la vie intellectuelle]. Elle vient se joindre au corps quand il est déjà formé [par l’âme végétative] et elle ne contribue à notre être que pour une part, en nous donnant la raison [en faisant de nous des animaux raisonnables, des hommes][1]. »

Voici l’explication que Ficin donne de ce passage dans son commentaire (Éd. Creuzer, t. I, p. 171) :

« Declarat (Plotinus) in fœtu hominum, in matrice jam figurato, infundi vitam ab animabus sphærarum Animaque totius, ad idem scilicet ipsa matris anima simul cum virtute paterna interim conferente, per quam vitam velut escam rationalis anima trahatur ad corpus, ipsamque ad se vitam quodammodo contrahat, sub actuque conservet ducatque suo, si quando desinat iterum genitura. Ibi esse simpliciter animal per modum formæ dat inferior anima ; esse rationale animal superior anima ipsa largitur, parum admodum modo formæ ad esse conducens. Et id quidem ex rationali potentia sive actu, quoniam non ad ipsum simpliciter esse ratione formæ, sed ad esse tale conferre videtur : atque eatenus ad esse tale quatenus ad esse simpliciter altera confert. Dici vero fortasse potest per modum efficientis ad esse conferre. »

L’explication de Ficin est au fond conforme à la théorie de Dante sur la génération.

  1. Ce passage doit être rapproché d’un passage analogue qui se trouve dans le livre iii, § 9, p. 178-179.