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DEUXIÈME ENNÉADE, LIVRE III.

vant votre nature à la formation des animaux, imitait l’action par laquelle ma puissance vous a fait naître. Comme il doit y avoir en eux une partie qui porte le même nom que les immortels, qui soit appelée divine, et qui ait le commandement dans ceux d’entre eux qui voudront toujours suivre la justice, je vous en donnerai la semence et l’ébauche, et vous, ensuite, à la partie immortelle alliez une partie mortelle, formez-en des animaux, produisez-les, donnez-leur la nourriture et l’accroissement, et, quand ils périront, qu’ils retournent à vous. » Il dit, et dans le même vase où il avait, par un premier mélange, composé l’Âme de l’univers, il versa le reste des mêmes éléments, et en fit un mélange à peu près de la même manière, si ce n’est qu’il n’y entra plus d’essence invariable comme la première fois, mais deux et trois fois moins parfaite. Ayant réuni le tout, il le divisa en un nombre d’âmes égal à celui des astres, et en donnant une à chaque astre, afin qu’elle fût portée par lui comme dans un char, il fit ainsi connaître à ces âmes la nature de l’univers et leur dit ses décrets immuables sur leurs destinées : que la naissance première serait uniformément la même pour tous les animaux, afin qu’aucun n’eût à se plaindre de lui ; que semées chacune dans celui des astres, instruments du temps, qui lui était attribué, elles devraient produire celui des animaux qui est le plus capable d’honorer la divinité ; et que, le genre humain étant divisé en deux sexes, l’un serait plus parfait, savoir celui qui plus tard serait appelé viril ; que lorsqu’elles auraient été unies invinciblement à des corps, qui recevraient des parties nouvelles et en perdraient d’autres, il en résulterait nécessairement, dans ces animaux, premièrement une sensation commune à tous, naturelle, excitée par les impressions violentes, et secondement l’amour mêlé de plaisir et de peine, et de plus la crainte et la colère et les autres affections qui viennent à la suite de celles-là, ou qui leur sont contraires : qu’en triompher, ce serait vivre avec justice ; y succomber, ce serait vivre d’une manière injuste ; que celui qui passerait dans la vertu le temps qui lui serait donné pour vivre, retournerait habiter avec l’astre à la société duquel il était destiné, et partagerait son bonheur ; que celui qui succomberait deviendrait femme dans une seconde naissance ; et que, si alors il persistait encore dans sa méchanceté, suivant le genre de vice auquel il se serait livré, il serait changé toujours en un animal d’une nature analogue aux mœurs qu’il se serait formées[1], et qu’il ne verrait le terme de ses transformations et de son

  1. Voy. p. 431.