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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

gesse... Dieu n’est injuste en aucune circonstance, ni en aucune manière ; au contraire, il est parfaitement juste ; et rien ne lui ressemble davantage que celui d’entre nous qui est parvenu au plus haut degré de justice. De là dépend le vrai mérite de l’homme, ou sa bassesse et son néant. Qui connaît Dieu, est véritablement sage et vertueux ; qui ne le connaît pas est évidemment ignorant et méchant... Il y a dans la nature des choses deux modèles, l’un divin et bienheureux, l’autre sans Dieu et misérable. Les hommes injustes ne s’en doutent pas, et l’excès de leur folie les empêche de sentir que leur conduite pleine d’injustice les rapproche du second et les éloigne du premier ; aussi en portent-ils la peine, menant une vie conforme au modèle qu’ils ont choisi d’imiter[1]. » Trad. de M. Cousin, t. II, p. 133-135.)

Au commencement du § 7, p. 128, Plotin dit : « La nature de ce monde est mêlée d’intelligence et de nécessité. Ses biens sont ce qu’elle reçoit de la divinité ; ses maux proviennent de la nature primordiale, ainsi que s’exprime Platon pour désigner la matière comme une simple substance qui n’est pas encore ornée par une divinité. » Ces lignes font allusion aux passages suivants du Timée et du Politique :

« La naissance de ce monde a été produite par un mélange de la nécessité et de l’action d’une intelligence ordonnatrice. Mais l’intelligence l’emportait, en persuadant à la nécessité de conduire vers le bien la plupart des choses qui naissaient, et c’est de cette ma-

  1. Dans le § 7, p. 128, Plotin, revenant sur le passage du Théétète que nous venons de citer, dit : « Qu’entend Platon par nature mortelle ? Quand il dit que les maux assiégent la région d’ici-bas, il veut parler de l’univers. On peut citer à l’appui ce passage : « Puisque vous êtes nés, vous n’êtes pas immortels, mais par mon secours vous ne périrez pas. Pour comprendre le passage du Timée que Plotin cite ici en le tronquant, il le faut lire dans son intégrité. Le voici complet : « Lorsque tous les dieux, ceux qui exécutent à nos yeux leurs révolutions, comme ceux qui ne se manifestent que quand il leur plaît, eurent reçu naissance, Celui qui a produit tout cet univers leur parla en ces mots : « Dieux, fils de Dieux, œuvres dont je suis l’auteur et le père, produits par moi, vous êtes indestructibles, parce que je le veux. En effet, tout ce qui est composé peut être dissous ; mais pour vouloir détruire ce qui est parfaitement ordonné et ce qui est bien, il faut être méchant. Ainsi, puisque vous êtes nés, vous n’êtes point immortels ni indissolubles absolument, et pourtant vous ne serez jamais dissous, et vous ne subirez point la mort, parce que ma volonté est pour vous un lien plus fort et plus puissant que ceux qui, à l’instant de votre formation, ont uni vos parties ensemble. » (Trad. de M. H. Martin, t. I, p. 111.)