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PREMIÈRE ENNÉADE, LIVRE I.
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se passe en haut ; car elles ne forment toutes trois qu’un seul être, où tout est lié par l’unité. La vie des sens ne possède par elle-même aucune lumière ; c’est pour cette raison qu’elle est si étroitement unie au corps auquel elle procure et les jouissances et les aliments dont il a besoin. On peut lui appliquer ces paroles du sage : Elle distribue la nourriture à sa maison et marque la tâche de ses servantes. La maison, c’est le corps qui est nourri ; » et les servantes sont les membres qui obéissent. Au-dessus de la vie des sens s’élève l’âme qui la subjugue, lui impose des lois et l’éclaire autant que sa nature l’exige. C’est ainsi que le principe animal est le siége de l’âme. Enfin, au-dessus de l’âme s’élève l’esprit, par lequel elle est dominée à son tour, et qui réfléchit sur elle une lumière de vie. L’âme est éclairée par cette lumière et dépend entièrement de l’esprit[1]. Après la mort, elle n’a pas de repos, les portes de l’Éden ne lui sont pas ouvertes avant que l’esprit soit remonté vers sa source, vers l’Ancien des anciens, pour se remplir de lui pendant l’éternité ; car toujours l’esprit remonte vers la source. » Chacune de ces trois âmes, comme il est facile de le prévoir, a sa source dans un degré différent de l’existence divine. La Sagesse suprême, appelée aussi l’Éden céleste[2], est la seule origine de l’esprit. L’âme, selon tous les interprètes du Zohar, vient de l’attribut qui réunit en lui la justice et la miséricorde, c’est-à-dire de la Beauté. Enfin, le principe animal, qui jamais ne s’élève au-dessus de ce monde, n’a pas d’autre base que les attributs de la force, résumés dans la Royauté[3].

Outre ces trois éléments, le Zohar en reconnaît encore un autre d’une nature tout à fait extraordinaire : c’est la forme extérieure de l’homme conçue comme une existence à part et antérieure à celle du corps, en un mot l’idée du corps, mais avec les traits individuels qui distinguent chacun de nous. Cette idée descend du ciel et devient visible dès l’instant de la conception : « Au moment où s’accomplit l’union terrestre, le Saint, dont le nom soit béni, envoie ici-bas une forme à la ressemblance de l’homme et portant

  1. On voit que, selon la Kabbale, la vie des sens est illuminée par l’âme, et l’âme par l’esprit, comme selon Plotin, la nature animale est illuminée par l’âme raisonnable, et l’âme raisonnable par l’intelligence. Voy. p. 359.
  2. L’Éden céleste correspond au monde intelligible des Néoplatoniciens.
  3. De même, selon Plotin, les intelligences particulières procèdent de l’Intelligence divine ; les âmes particulières, de l’Âme universelle ; les raisons séminales individuelles, de la Raison totale de l’univers ou Puissance naturelle et génératrice, engagée dans la matière (p. 184, 191-103, etc.).